Extraits de Chine

C'est le moyen pour moi d'échanger sur la Chine, de faire partager mes voyages en Chine, des lectures sur la Chine, des analyses, des impressions, d'aller au-delà des peurs qu'inspire ce grand pays si entreprenant en essayant de comprendre ses propres craintes, ses propres défis mais aussi de pointer les questions qu'il soulève. Nous aurons peut-être ainsi l’occasion de faire un bout de chemin ensemble.

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Le Clézio et ... Lao She

par dans Extraits de Chine
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J. M. G. Le Clézio aime l'écrivain chinois Lao She (1899-1966). Dans son dernier livre intitulé Quinze causeries en Chine - Aventure poétique et échanges littéraires (2019, Gallimard) – que je viens de lire – le Prix Nobel de littérature 2008 revient à de nombreuses reprises, au fil de ses conférences données dans différentes universités chinoises ces dernières années et réunies dans l'ouvrage, sur les qualités littéraires de Lao She. Extraits.

Source : Quinze causeries en Chine, pp. 72-73, Ed. Gallimard, 2019).

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[...] Le second romancier dont je voudrais citer l'exemple, puisque nous sommes en Chine, est Lao She, auteur mondialement reconnu, entre autres, pour ses romans : Le Pousse-pousse, l'Enfant du Nouvel An, et Quatre générations sous un même toit. La forme des romans de Lao She l'apparente à l'école réaliste à la manière des romans de Dickens ou de Balzac, et du roman social de Sinclair Lewis ou John Steinbeck, cependant ce n'est pas cette facilité qui lui donne un caractère universel. Ce qui donne force et grandeur à son œuvre, c'est qu'elle est tout entière nourrie par une histoire particulière, en porte-à-faux, celle de la communauté mandchoue en train de disparaître dans les tourbillons politiques et les guerres du XXe siècle. Son inspiration (comme celle de Faulkner) est en quelque sorte diamétralement opposée au cours de l'histoire.

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L'univers qu'il dépeint est à la fois extraordinairement précis et réel, et au même instant évanescent, fantomatique. C'est celui des petits quartiers de hutong de la capitale, ou de Shanghaï, où règnent encore les traditions familiales, les superstitions, les préjugés de classe. Dans ce monde fermé, drolatique, exubérant, les personnages prennent parfois des dimensions héroïques, comme Petit Cui dans son combat avec Mme Guan (surnommée la Grosse Courge rouge) ou le vieux poète Qian, arrêté par les Japonais et qui résiste avec dignité. La Chine qu'il décrit n'a, en apparence, rien à voir avec la Chine du futur. Pourtant nous partageons la vie de ces modestes héros, dans leur refus de l'occupation, dans la douleur des drames domestiques. L'universalité de Lao She vient de son enracinement, de cet entêtement qu'il met à faire revivre le passé. Dans l'amour qu'il témoigne à sa ville natale, qu'il aime, dit-il, "comme un enfant aime sa propre mère". Son œuvre est un inlassable inventaire de la vie, des bruits, des goûts, des saveurs, des odeurs, des rituels, de la musique du quotidien qui composaient le tableau de la vie dans l'une des plus anciennes villes du monde. En 1966 (juste avant sa mort), Lao She s'en expliqua, alors que la Révolution culturelle commençait: "Je ne peux écrire sur ce combat, dit-il au journaliste américain Gelder, car je ne puis sentir et penser comme un étudiant [...]. Nous autres, les anciens, nous ne pouvons demander pardon pour ce que nous sommes. Nous pouvons seulement expliquer pourquoi nous sommes ainsi, et encourager les jeunes à trouver leur voie vers le futur." L'on voit tout ce qui sépare la littérature de la réalité. Lao She atteint l'universel pour ainsi dire par inadvertance. Ce n'est pas l'exactitude du monde qu'il décrit, mais la force de conviction de son enracinement, de son obstination à faire revivre son monde particulier. Comme l'Egyptien Mahfouz, comme le New-Yorkais Henry Roth, auteur de l'admirable Call It Sleep, Lao She nous change et fait de nous ses contemporains.

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Mots clés: littérature Pékin
Venue en Chine en 2012 rendre une trop courte visite à mon fils, j’ai mesuré à quel point ma vision de ce pays était biaisée par des partis pris, des représentations d’un autre âge...
Depuis, je m’informe sur ce vaste et grand pays avec lequel nous avons à composer pour construire le monde de demain dans le respect de nos différences et de nos intérêts.


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Invité jeudi, 18 avril 2024

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